Ecrire ou mourir

Disparaître

Je m’impose de nombreux exercices de style pour obliger mon esprit à trouver ses mots. Des mots que j’oublie, des synonymes qui ne viennent pas, des images qui sont là, au bout de la langue mais ne sortent plus … Se plier à la gymnastique du cerveau quand il vous échappe. Quand les absences se multiplient et que la peur s’installe.

Combien d’instant à se sentir comme la flamme d’une bougie qui meurt faute de cire … être au milieu de nulle part et ne pas se reconnaître … être submergée d’un seul coup par une angoisse terrible qui mélange les gestes, appesantit la parole, alourdit l’expression … se sentir si démunie face au vide, incapable de réagir comme on sait toujours l’avoir fait. Et là … rien … nada … game over et the same player don’t shoot again …

Les pensées virevoltent sans que je puisse en saisir aucune. Je me disperse pour oublier que je me perds. Je crâne, je ris de ne plus me voir en ce miroir, j’élude, j’échappatoire … mais je la sais à l’affût, cette fleur vénéneuse qui me ronge. Elle prolifère sur les traces d’une vie qu’elle compte bien détruire jusqu’au bout. Effacer la mémoire, reformater le disque sans réinstaller le système, tel est l’unique but qu’elle poursuit. Je m’entraîne à voyager dans le noir, sans repère et sans souvenir. Je me repais de mon passé avant qu’il ne sombre dans un non-avenir.

Inutile de plaider la fatigue, la grisaille, la solitude ou toute autre forme rampante d’alibi. Mes larmes ne sont pas loin mais je ne les laisse pas couler. Je n’ai pas de temps à perdre à me déshydrater. Dans la brume qui me recouvre, je me floute et je m’habitue à disparaître. Mais peut-on disparaître quand on n’a pas été ?