Ecrire ou mourir

Femme d'ébène

J’ai publié ces quelques lignes il y plus de 30 ans, en hommage aux femmes africaines du village de Petit Mbao (qui n’est plus un village depuis longtemps). Je les ai retrouvés un jour sur la « toile » sous un nom qui n’était pas le mien. Sans mention de la source. Désagréable sensation que j’ai manifestée auprès du voleur de mots. Pas de réponse mais le texte a disparu du blog en question quelques jours plus tard …. Etrange ….

A toi femme d’ébène dont le corps ploie sous les ans
Ma colère et ma douleur de ne pouvoir t’en décharger
Oubliée de Dieu, soumise aux hommes
Ta grève de la faim est éternelle et silencieuse
Femme noire, femme du monde
Tu portas en toi l’éternité
Il t’a fallu tant de courage pour en accoucher
Il a suffit de si peu de fous pour la crucifier

Corps de liane, aux muscles saillants
Chaque jour, à l’aube, recommence ton combat
Celui de l’eau, du mil, de la vie
Je regarde mes mains trop claires
Trop lisses de n’avoir pas pu t’aider
Femme à la peau noire qui fait rêver
Toutes les peaux blanches de son obscurité
Et que le soleil éclatant rend parfois bleutée

Femme d’ébène à moi si semblable
Ventre fécond d’une savane sauvage
Où feulent les félins que l’odeur de l’amour attire
Même corps fait de même chair
Je t’offre l’histoire d’un plaisir qu’on t’a coupé
Tu me murmures la femme dans la femme assassinée
Je te conte l’extase que ne connaîtront pas tes lèvres collées
Tu chantes la femelle qui se soumet

Femme de nuit dont la mélopée endort l’enfant
Tu cherches au fond de mon regard
Une réponse au plus sombre de tes pourquoi
Femme noire aux seins généreux
Je ne peux que te parler d’une si maigre espérance
D’une négritude à l’intérieur de moi lovée
A toi Femme d’ébène femme pudeur femme de paix
Mes doigts blancs dans tes paumes noires refermées